La pratique de la méditation, qu’elle soit laïque ou non, m’a montré ces dernières années que l’attention est souvent portée par les attentes et les peurs, par la recherche ou la crainte. Qu’ils se manifestent de manières évidente ou cachée, ces traits émotionnels accompagnent tout un chacun dans bon nombre de nos décisions. Ils constituent un travail de premier choix pour ma pratique car ils sous-tendent beaucoup de traits ou de comportements secondaires.

Il peut apparaitre évident que la pratique méditative nous aide à se libérer des peurs, mais moins qu’elle nous aide à pacifier les attentes. Pourtant, attentes et peurs sont comme l’ombre et la lumière. Focaliser son expérience seulement sur les peurs ne nous aide pas vraiment. Les peurs se transforment en attentes et reprennent leur vrai visage dès que l’attention se relâche. Steven Hayes a mis en lumière à travers la thérapie ACT à quel point la recherche de bonheur pouvait faire partie prenante du désespoir.

On rétorque habituellement que sans espoir, on n’est rien. Il existe pourtant une autre approche qui peut nous aider à être plus libre de nos attentes et de nos peurs.

L’attente et la peur dans la pratique du bouddhisme

Selon Nagarjuna, une figure centrale du bouddhisme Mahayana , on peut distinguer quatre types d’attentes et de peurs:

  • L’attente d’être reconnu par nous-même ou les autres, la peur de ne pas l’être,
  • L’espoir d’avoir des gains, la crainte de la perte,
  • L’attente des honneurs, la crainte de la critique,
  • L’attente du plaisir, la peur du déplaisir.

Une approche occidentale des attentes et des peurs ?

Il y a quelques années, je suis tombé sur le modèle SCARF, qui m’a rappelé celui que l’on appelle « les huit dharmas mondains » dans le bouddhisme. Établi par David Rock, il vient d’un ensemble de recherches dans les neurosciences sociales. Rock et son équipe expliquent que nous sommes tous guidés par la recherche de la carotte et la peur du bâton, mais que cela se décline particulièrement autour de cinq thèmes principaux:

  • Notre statut ou notre position par rapport aux autres, que nous souhaitons garder et affirmer, ou que nous avons peur de perdre,
  • La recherche de certitude et de pouvoir prédire le futur, ou la peur de l’incertitude,
  • L’aspiration à être autonome et contrôler les événements, ou la peur de perdre en autonomie,
  • L’aspiration à être relié à autrui, et la peur d’être rejeté, pas aimé,
  • La recherche d’un sentiment d’équité dans les échanges avec les autres, ou l’aversion face au sentiment d’injustice.

Ces cinq facteurs seraient déterminant dans les liens sociaux, qu’on en soit conscient ou non, et ils sont marquant dans nos prises de décisions.

Une convergence des approches à travers la méditation de l’attention ?

Dans le bouddhisme, on considère que ces états d’esprits empreints d’attentes ou de peurs nous éloignent d’un comportement authentiquement altruiste et du discernement. Habité par la peur et les attentes, on ne peut être en lien authentiquement à l’autre.

Dans les neurosciences sociales, le model SCARF aide à prendre conscience d’un certain nombre de comportements dysfonctionnels dans nos relations à l’autre. La peur de souffrir, la volonté d’éviter ce qui nous menace ou l’envie d’être en sécurité créent des comportements qui ont souvent l’effet inverse de ce qui est recherché.

J’associe depuis plusieurs années le modèle SCARF dans mes interventions de pleine conscience dans les organisations. Il se révèle particulièrement pertinent pour comprendre comment la méditation peut aider dans les situations complexes où l’incertitude est reine. Je souhaite aujourd’hui aller plus loin et mettre en place un cycle de pratique méditative plus intensif qui nous permettre d’aborder les attentes et les peurs dans le cadre d’une retraite silencieuse.

Les phases de la méditation sur les attentes et les peurs

Pour faire bref, la méditation nous permet de trouver ne serait-ce qu’un peu d’espace au coeur de nos peurs. Cet espace au minimum nous aide à accepter, ou mieux nous permet de développer un champ d’action et de réponse. Alors que nos peurs vont nous réduire à nos tendances.

Un autre phase de la pratique est que cet espace puisse être un espace de générosité, de don. C’est une phase délicate car cela ne doit pas être la conséquence d’une fabrication mais d’une simple qualité de présence. C’est dans cette qualités que les attentes peuvent à la fois être vues et se libérer. Nous accompagnerons les participants afin qu’ils puissent, à un niveau ou un autre cultiver simultanément ces deux expériences.

L’amour, c’est libérer l’autre de nos propres attentes.

Khandroma

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